Le mystère des élastiques rouges

Au pays de Sherlock Holmes, enquêter, investiguer est presque un devoir national. Une seconde nature que j’ai moi-même adopté pour résoudre le “mystère des élastiques rouges“.

Depuis que je suis installé en Albion, je remarque chaque jour que les trottoirs sont parsemés d’élastiques rouges. Devant chaque maison, ou presque, ces bracelets de caoutchouc jonchent le sol et ceux du jour s’ajoutent à ceux de la veille. Mystère, mystère. Tom Thumb (l’équivalent Anglais de notre Petit Poucet ou Tom Pouce) aurait-il changé de jalons pour retrouver son chemin vers la maison ? Le marchand d’élastiques rouges aurait-il un gros trou dans son sac ?

Après avoir planqué des jours et des nuits à observer la rue, le mystère s’est éclairci un matin à l’heure du facteur.

Les élastiques rouges sont, en effet, généreusement semés au sol par les agents de Royal Mail, autrement dit les facteurs. Pour chaque maison, les lettres et plis sont regroupés et liés entre eux par les fameux élastiques rouges. Avant de glisser le courrier dans la boite ou dans la fente de la porte d’entrée, le postman enlève le bracelet et… le jette au sol dans un geste fort peu écologique. Les élastiques rouges ne pourraient-ils pas être conservés et réutilisés dans le double intérêt de faire une substantielle économie et de préserver les trottoirs de cette pollution aussi inutile qu’inesthétique ?

Près d’un milliard de ces red rubber bands sont ainsi jetés au sol chaque année par les facteurs pour un budget qui avoisine le million de livres.

Il n’en fallait pas moins pour susciter l’indignation des associations environnementales, en particulier “Keep Britain tidy“ qui a invité les usagers à renvoyer à Royal Mail les élastiques trouvés devant chez eux. La Poste britannique en aurait déjà reçu 13 000.

Ce geste des facteurs est d’autant moins compréhensible et d’autant plus condamnable qu’en Angleterre le quidam qui se laisse aller à jeter des détritus au sol est passible d’une amende de £80. Les facteurs anglais seraient donc au-dessus des lois ?

Relativisons cependant. Sur les trottoirs on ne marche pas sur un lit de caoutchouc rouge. Les élastiques sont en effet ramassés par les enfants qui en font la collection. Le grand jeu étant de les accrocher au guidon de sa trottinette ou de son vélo. Celui qui en exhibe le plus est le plus balèze.

Et puis, relativisons également l’impact de cette pollution puisque Royal Mail a déclaré que les élastiques rouges sont  plus biodégradables que les marrons qu’elle utilisait précédemment. Ouf, nous voilà rassurés.

Prochaine énigme sur mon carnet d’enquêtes, celle du gros ventre des Anglais. Mes indices convergent vers une boisson fermentée de couleur jaune clair. L’enquête se poursuit, j’y travaille très sérieusement en donnant de ma personne. A suivre…