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Bons baisers d'ici, de là et d'ailleurs
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13 octobre 2010

A la fois PTDR et envieux

Les Anglais portent un regard ambigu sur les manifestations françaises contre le recul de l’âge de départ à la retraite. A la fois PTDR (pétés de rire, ndlr) et envieux du système français.


Manif_retraite


D’un pays à l’autre les modèles sociaux sont difficilement comparables, mais l’exercice est tentant dès que l’on aborde une valeur aussi universelle que celle du travail. Et en conséquence, l’après travail, cette période bénie de post activité que l’on appelle “retraite“. Une seconde vie en roue libre, que l’on souhaite forcément douce et heureuse, à l’abri de tous tracas.

Les Anglais regardent d’un drôle d’air ces milliers de Français qui, dans la rue, manifestent bruyamment et abondamment contre l’allongement de leur période d’activité qui porterait l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans. Au mieux !

Les Anglais, qui ne peuvent prétendre au repos avant 65 ans, sont envieux du système français et manifesteraient bien, non pas contre, mais pour la retraite à 62 ans. Mais protester tapageusement n’est pas dans les british habitudes. A part dans les stades de foot.

Ils préfèreront se faire narquois et railler cette exception française qu’est la grève, d’autant plus quand il s’agit de s’accrocher fermement au privilège d’être le pays européen qui met le plus tôt ses travailleurs à la retraite.

Les Anglais sont secrètement envieux de l’âge de départ à la retraite français, mais aussi (surtout, peut-être) de la rémunération de ces retraites, juste retour d’un mode de cotisation différent du leur.

 

97,65 livres par semaine

 

De ce côté de la Manche, la cotisation salariale est minime et, quand après 30 années d’activité (qualifying years) et de contribution à la National Insurance, sonne l’heure du départ, de l’employé au patron, tous les ex salariés perçoivent une retraite d'État (basic state pension) à tarif unique de l’ordre de 97,65 livres par semaine, soit 111,27 euros (cours du 14/10/2010). Inutile de dire combien, dans ce pays où tout est plus cher que sur le continent, ça ne suffit pas pour couler une vie de senior confortable et heureuse. Surtout quand, par le passé, on a eu un bon salaire et que l’on est habitué à un certain style et train de vie.

Donc, plus qu’en France, il faut prévoir, épargner durant ses qualifying years, autrement dit se faire soi-même sa retraite au moyen de plans épargnes retraites privés et autres complémentaires qui viendront améliorer l’ordinaire le moment venu.

Le problème, depuis quelques années, c’est que ces plans épargne, pour la plupart, basés sur des fonds d’investissement capitalistiques, des fonds de pensions privés, ont eux aussi pris la crise de plein fouet. Assises sur des valeurs boursières en totale décrépitude, les retraites complémentaires de nos petits vieux anglais se sont noyées dans le naufrage de l’économie mondiale et aujourd’hui on estime que sur les 11 millions de retraités que compte le pays, 2 millions vivent en dessous du seuil de pauvreté. Et ceux qui, pensaient avoir eu le nez creux en prévoyant leur retraite, en épargnant, en plaçant, se retrouvent au même niveau que ceux, nombreux, qui n’ont jamais eu les moyens de mettre un sou de côté.

Pas étonnant que New Labour de Tony Blair et de Gordon Brown, qui avait initié ce modèle des retraites, copier/coller du système américain, se soit fait laminer lors des dernières élections.

 

Des boulots d’appoint pour s’en sortir

 

Avec une basic state pension fixée à 97,65 livres par semaine, et une complémentaire aléatoire, assujettie au redémarrage des bourses mondiales, on comprend pourquoi, en Angleterre on voit beaucoup de seniors au travail. Dans les magasins, dans les supermarchés, dans les services publics, ils sont là à trimer pour améliorer un ordinaire déjà pas folichon. Mais pour gagner quoi ? Car les revenus de ces boulots d’appoint à temps partiel que prennent les seniors sont taxés et donnent lieu à réduction de la pension retraite. A défaut d’augmenter conséquemment leurs revenus, les seniors y trouvent au moins l’avantage de s’occuper et par conséquent éviter de “psychoter“ sur leur sort et ne pas dépenser toute leur pension au pub.

Parmi ces seniors actifs on rencontre beaucoup de femmes, particulièrement malmenées par le système du travail et des retraites. Même si leur âge légal de départ est fixé à 60 ans, les années passées à faire et à s’occuper des enfants, puis souvent à rester au foyer pour permettre à monsieur de mieux assurer son boulot, ne sont pas décomptées.

Enfin, cerise sur le pudding, quand en France on hurle à l’allongement du temps de travail de 60 à 62 ans, en Angleterre une loi vient d’être votée pour passer celui-ci graduellement de 65 à 68 ans pour les hommes et de 60 à 65 ans pour les femmes à l’horizon 2020. Les Anglaises, déjà mal servies par le système, perdent plus que les hommes dans cette affaire.

Alors pensez bien que la retraite française, même à 62 ans et avec une pension minimum qui permet encore de vivre à peu près décemment, ils en rêvent… même si, devant leur télé ils sont PTDR à la vue de ces manifestations so French. Ce n'est pas ici que l'on verra salariés, étudiants et retraités dans la rue, manifester contre les projets gouvernementaux. Ce genre de mesure est accepté comme une nécessaire fatalité et les Anglais sont prêts à tout pour sauver leur système, quitte à se serrer la ceinture tellement fort que ça en fait mal au ventre et aux fesses. C'est ce qui fait la différence avec la France. Mais de cet état d'esprit très british on reparlera dans un prochain article.

 

Les retraites boostées par les fonds de pension

 

Pour éviter la dramatique situation de devoir vivre avec 97 livres par semaine après 30 années de labeur, la solution, en Angleterre, est de se construire soi-même sa retraite tout au long de sa période d’activité. Les entreprises elles-mêmes proposent à leurs employés de souscrire à une complémentaire moyennant une ponction sur salaire à définir entre les deux parties. Conscient de la situation des retraités et des dégâts provoqués par la crise mondiale en ce début de XXIe siècle, le gouvernement britannique a récemment annoncé que les retraites complémentaires seraient rendues obligatoires pour tous les salariés et que le niveau des state pensions sera réévalué.

Les compagnies d’assurances et d’investissements proposent elles aussi un grand nombre de produits d’épargne retraite, encore faut-il faire le bon choix.

Beaucoup de ces produits étaient assis sur de fonds de pension dont on connaît le sort subit avec la crise. Ce système a formidablement bien fonctionné jusqu’aux années 1990 et les retraités qui ont joué ce jeu ont largement gagné. C’est l’une des raisons de l’arrivée en France et en Espagne, dans ces années-là, de nombreux retraités Anglais. En associant pensions retraites boostées par la bonne rémunération des fonds de pension et prix attractifs de ces deux pays, ils faisaient coup double pour s’assurer une belle vie avec le soleil et la gastronomie en prime. Cet idéal a pris fin pour beaucoup d’entre eux qui, la crise n’aidant pas, ont vu leur pension fondre comme le foie gras sur un magret bien chaud. La plupart, qui avaient conservé leur pied à terre en Angleterre, on du bazarder au plus vite leurs biens à l’étranger, mettre un terme à leur retraite au soleil pour mieux revenir au pays vivre selon des moyens devenus soudainement plus modestes.

La leçon a t-elle porté ? Pas sûr puisque les compagnies d'assurances continuent à proposer des produits retraites tout aussi risqués avec pour carotte la “probable“ reprise rapide de l’activité boursière. Lesquelles compagnies d'assurances tombent comme des mouches, vaincues par la crise et la banqueroute, emportant avec elles les pensions qu'elles devaient verser aux retraités qui leur avaient fait confiance. En Angleterre, chat échaudé ne craint pas forcément l’eau froide…

 

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Bons baisers d'ici, de là et d'ailleurs
  • Back to France. Belle expérience de vie en Angleterre où l'herbe est effectivement plus verte, mais pas pour les raisons que je pensais. La vie “normale“ reprend ses droits. Coups de cœur, coup de gueule, belles rencontres… les affaires reprennent.
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